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Les Affinités électives

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Goethe - Heinrich Christoph Kolbe

Goethe – Heinrich Christoph Kolbe

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Die Wahlverwandschaften

« Les Affinités électives » c’est l’élégante traduction française du titre d’un célèbre roman de Johann Wolfgang von Goethe: « Die Wahlverwandschaften », littéralement « Les apparentements choisis ».

Selon le personnage du roman « Le Capitaine » (Othon): « L’homme prête sa sagesse et ses folies, sa volonté et ses caprices aux animaux, aux plantes, aux éléments, aux dieux. »  (« Le Capitaine », dans « Les Affinités électives » de Goethe).

D’après Goethe, ce roman est la seule œuvre majeure qu’il ait écrite «après avoir exposé une idée globale». En conséquence, « Die Wahlverwandtschaften » [« Les Affinités électives »] est très dense quant à sa conception et sa construction est très soignée. Thomas Mann le célèbrait comme «une merveille de réussite et de pureté de la composition, de richesse des relations, d’enchaînement, d’unité».

Le thème du roman

Voici le sujet de l’histoire:

« Aux environs de Weimar, Édouard et Charlotte, un couple d’aristocrates unis après un premier mariage, invitent un ami d’enfance d’Édouard, Othon, nommé le « Capitaine », puis, malgré le pressentiment funeste de Charlotte, Otilie, la nièce de Charlotte, belle et orpheline, les rejoint. La description d’une expérience scientifique, celle des «Affinités électives», au chapitre IV de la première partie, permet déjà de présager la suite de la narration dans laquelle l’attachement de plus en plus exclusif d’Édouard pour Odile [Otilie] aura des conséquences funestes. » (Source).

Les Affinités électives

Ce qui nous intéresse ici, ce n’est – bien que cela ne manque pas non plus d’intérêt -,  fondamentalement pas l’aspect dramatique et psychologique de l’histoire, mais le principe même des Affinités électives, en tant qu’illustration de la deuxième Loi fondamentale de la Création, la Loi de l’Attraction du Genre Semblable.

Sur le plan conceptuel, la notion de base précise sur laquelle repose la formulation de la Loi est, en allemand, « Gleichart »: « Genre Semblable ». La notion d’« Affinité » est plus vague et plus approximative. Ce sont les genres semblables qui s’attirent. La notion d’affinité, notamment valable dans la chimie naturelle, évoque davantage des points communs susceptibles de constituer des points d’accroche. Cela concerne surtout ce que l’on peut qualifier d’affinités « périphériques ». En effet, lorsqu’il n’existe que des affinités périphériques, il n’y a pas forcément d’attraction fondamentale, qui, elle, ne concerne que le Noyau de l’être, son esprit.

Ces affinités périphériques, plutôt que de concerner le Noyau de l’être et donc le genre spirituel de l’être humain, sont principalement des affinités de situation, des affinités de destin ou de karma similaires, des affinités de tempérament, etc., qui ne concernent que les enveloppes de l’être et non son Noyau. La Loi d’Attraction du Genre Semblable proprement dite agit fondamentalement sur les Noyaux spirituels des êtres humains et secondairement sur leurs corps fin-matériels.

Une expérience scientifique avec des êtres humains comme « cobayes »

Le chapitre quatre présente, à l’occasion d’un échange entre les personnages, une véritable théorie scientifique sur les rapports d’attirance et de répulsion entre les éléments chimiques, qui, par métaphore, permettent de comprendre aussi les relations humaines. En effet, juste après avoir souligné que deux couples d’éléments AB et CD mis en présence se désunissent pour former entre eux une union nouvelle, AC et BD, Charlotte annonce l’arrivée d’Odile: Deux couples (en réalité, les deux personnes supplémentaires ne sont pas un couple) vont donc être mis en présence et l’expérience « scientifique » va pouvoir commencer.

Le titre du roman correspond, en effet, au goût et à l’inclination de Goethe pour les sciences naturelles (il a, par exemple, aussi écrit la « Métamorphose des plantes » et le célèbre « Traité des Couleurs »), qui sont mentionnées à plusieurs reprises dans le texte lui-même. L’expression « Wahlverwandschaften » [« affinités électives »] est emprunté à la chimie de l’époque. Il décrit un processus pouvant se produire lorsque deux composés chimiques se trouvent en présence l’un de l’autre. Si l’attraction du genre semblable est, entre les deux, suffisamment intense, les composants de ces composés se détachent les uns des autres pour s’unir de nouveau avec l’un des partenaires libéré de l’autre composé.

En fait, cela ne se produit donc que lorsque l’attraction existant entre deux éléments nouvellement mis en présence est plus forte que l’attraction initiale entre les deux premiers éléments antérieurement déjà unis.

Que se passe-t-il lorsque deux éléments initialement associés sont ensuite, du fait de l’arrivée de deux nouveaux éléments, confrontés à une attraction plus forte?

Dans le quatrième chapitre de la première partie, les héros de l’histoire – le trio Eduard (le Baron), Charlotte et le Capitaine (Othon) – conversent au sujet de ce fait et le transposent en plaisantant à leur propre situation. Ils donnent ainsi à comprendre que le titre du roman doit, lui aussi, être compris au sens figuré: le roman examine dans quelle mesure ses quatre personnages principaux agissent en raison de nécessités imposées par les Lois de la Nature ou par des décisions prises librement par leur volonté.

Le lien entre la chimie et les comportements humains, qui, d’un point de vue plus actuel, semble qielque peu violent, s’explique d’une part par l’état de la science à l’époque, qui ne faisait pas encore de distinction claire entre chimie et alchimie, et d’autre part par la vision du monde (cosmogonie) personnelle de Goethe. Il était, en effet, à juste titre, convaincu que tous les phénomènes de la Nature vivante étaient reliés entre eux.

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Charlotte, dans le roman de Goethe

Charlotte, dans le roman de Goethe

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La théorie scientifique des Affinités électives

C’est donc dans le chapitre IV du roman qu’est exposée la théorie scientifique qui sous-tend la dramaturgie du roman:

« – Je ne veux pas vous éloigner de l’objet qui captive en ce moment votre attention, dit Charlotte, veuillez juste m’expliquer le sens attaché, dans le livre que nous lisons, au mot «affinité»? (…)

Le Baron réfléchit un moment, puis il dit à son ami:

– Comment nous y prendre pour lui donner, sans fatigant préambule, une explication claire et précise? (…)

Le Capitaine reprit:

– Ce que nous voyons avant tout, dans les diverses productions de la Nature, c’est qu’elles ont entre elles des rapports bien définis. Cela peut vous sembler bizarre de m’entendre dire ainsi, ce que tout le monde sait déjà; mais ce n’est toujours que par le connu qu’on peut parvenir à l’inconnu.

– Sans doute, interrompit Édouard, laisse-moi lui citer quelques exemples vulgaires qui nous assisteront à merveille. L’eau, l’huile, le mercure ont, dans chacune de leurs parties, un principe d’unité et d’union. La violence ou d’autres incidents déterminés peuvent anéantir cette union; mais, dès que ces causes ont disparu, elle reprend toute sa force.

– Rien n’est plus vrai, dit Charlotte, les gouttes de pluie se réunissent et forment des fleuves. Je me souviens même que, dans mon enfance, j’ai souvent cherché à séparer une petite masse de vif-argent, mais les globules se rapprochaient toujours, malgré moi.

– Permettez-moi, continua le Capitaine, de mentionner un point important dont vous venez de constater la vérité. C’est que le rapport pur, devenu possible par la fluidité, se manifeste toujours sous la forme de globules. La goutte d’eau et celle du vif-argent sont rondes; le plomb fondu même s’arrondit, s’il tombe d’assez haut pour se refroidir avant de toucher un autre corps.

– Je vais vous prouver, dit Charlotte, que je vous ai deviné. Vous vouliez me dire que, puisque chaque corps a des rapports avec les parties dont il se compose, il doit en avoir aussi avec les autres corps

– Et ces rapports, reprit vivement le Baron, ne sont pas les mêmes pour tous les corps. Les uns se rencontrent comme de bons amis, d’anciennes connaissances qui se confondent sans se réduire mutuellement à changer de nature, tels que l’eau et le vin. Les autres restent étrangers, ennemis même, en dépit du mélange, du frottement ou de tout autre procédé mécanique par lesquels on voudrait les unir, telles que l’eau et l’huile; en les secouant ensemble on les confond juste un instant, mais elles se séparent de nouveau aussitôt.

– Cette petite leçon de chimie, dit Charlotte, est presque l’image de la société dans laquelle nous vivons. J’y reconnais toutes les classes dont elle se compose; la noblesse et le tiers-état, le clergé et les paysans, les soldats et les bourgeois.

– Sans doute, reprit Édouard, et, s’il y a dans la société des lois et des mœurs qui rapprochent et unissent les classes naturellement opposées les unes aux autres, il y a dans le monde chimique des médiateurs qui rapprochent et unissent les corps qui se repoussent mutuellement

– C’est ainsi, interrompit le Capitaine, que nous unissons l’huile à l’eau par le sel alkali.

– N’allez pas si vite, Messieurs, je veux marcher du même pas que vous; il me semble que nous touchons de bien près aux affinités?

– J’en conviens, Madame, et c’est l’instant de vous les faire connaître dans toute leur force.

Nous appelons affinité la faculté de certaines substances, qui, dès qu’elles se rencontrent, les oblige à mutuellement se saisir et se déterminer.

Cette affinité est surtout remarquable et visible chez les acides et les alkalis qui, quoique opposés les uns aux autres, et peut-être à cause de cette opposition, se cherchent, se saisissent, se modifient et forment ensemble un corps nouveau.

La chaux, par exemple, a un penchant prononcé pour tous les acides. Lorsque notre laboratoire de chimie sera monté, nous ferons devant vous des expériences qui vous instruiront mieux que des mots, des noms et des termes techniques.

– Permettez-moi de vous faire observer, dit Charlotte, que si cette singulière faculté mérite le nom d’affinité, ce n’est pas du moins une consanguinité, mais une parenté d’esprit et d’âme. C’est ainsi qu’il peut y avoir parmi les hommes de sincères et réelles amitiés; car les qualités opposées n’empêchent pas les personnes qui les possèdent de se rapprocher et de s’aimer.

J’attendrai, puisque vous le voulez, les expériences qui doivent me démontrer plus clairement les miraculeux effets de vos mystérieuses affinités. Maintenant, mon ami, continua-t-elle en s’adressant à son mari, reprends Ta lecture, je l’écouterai avec plus d’intérêt qu’avant cette digression.

– Puisque Tu l’as provoquée, répondit Édouard en souriant, Tu ne la termineras pas si vite. Il me reste à Te parler des cas les plus compliqués et qui sont les plus intéressants. C’est par eux que l’on apprend à connaître les divers degrés des affinités et leurs rapports plus ou moins puissants ou faibles, plus ou moins intimes ou éloignés. Oui, les affinités ne sont réellement intéressantes que lorsqu’elles opèrent des séparations, des divorces.

– Ces vilains mots, que l’on entend trop souvent prononcer dans le monde, figurent donc aussi dans le vocabulaire de la chimie?

– Sans doute, et cette science elle-même, lorsque la langue allemande n’avait pas encore adopté la foule de mots étrangers dont elle se sert aujourd’hui, s’appelait l’art de séparer («Scheidekunst»).

– On a bien fait de lui donner un autre nom, et, pour ma part, je préférerai toujours l’art d’unir à celui de séparer. Mais, voyons, puisque vous le voulez, Messieurs, citez-moi un exemple de ces malheureuses affinités qui engendrent des divorces.

– Nous continuerons à cet effet, dit le Capitaine, à vous citer les exemples dont nous nous sommes déjà servis. Ce que nous appelons pierre calcaire, n’est qu’une terre calcaire plus ou moins pure et très étroitement unie à un acide subtil que nous ne pouvons saisir que sous la forme d’air. En mettant un morceau de cette pierre dans de l’acide sulfureux liquéfié, cet acide s’empare de la chaux et se métamorphose avec elle en plâtre, tandis que l’acide subtil s’envole.

Pourrait-on ne pas voir dans ce phénomène la séparation d’une ancienne union et la formation d’une union nouvelle? Nous appelons ces sortes d’affinités des affinités électives [« Wahlverwandschaften »], car il y a eu choix, préférence, élection, puisqu’un ancien lien a été brisé, afin qu’un autre lien, qu’on lui a préféré, ait pu se former.

– Pardonnez-moi, dit Charlotte, mais je ne vois rien là qui ressemble à une élection, à un choix; c’est, tout au plus, une nécessité de la Nature, ou un résultat de l’occasion qui a fait non seulement les larrons, mais encore les amis et les amants. Quant à l’exemple que vous venez de me citer, si l’on pouvait admettre qu’il y a eu, en effet, un choix, ce serait au chimiste qu’il faudrait l’attribuer, puisqu’il a rapproché les corps dont il connaissait les propriétés. Qu’ils s’arrangent ces corps, ils m’intéressent fort peu, je ne plains que le pauvre acide aérien réduit à errer dans l’infini.

– Il ne tient qu’à lui, répondit vivement le Capitaine, de s’unir à l’eau et de reparaître en source minérale pour la plus grande satisfaction des malades et même de ceux qui se portent bien.

– Vous parlez comme pourrait le faire votre plâtre; il n’a rien perdu lui, puisqu’il s’est complété de nouveau; mais l’infortuné souffle, banni, qui sait ce qui pourra lui arriver avant qu’il ne trouve à se caser une seconde fois?

Édouard se mit à rire.

– Ou je me trompe fort, dit-il à sa femme, ou Tu Te moques de moi. Oui, oui, j’ai deviné Ta malicieuse allusion. Tu me compares à la chaux, et notre ami le Capitaine à l’acide sulfureux qui, en s’emparant de moi, sous la forme d’acide sulfurique, m’a arraché à Ta douce société et métamorphosé en plâtre réfractaire. Puisque Ta conscience T’accuse ainsi, mon ami, je puis être tranquille. Au reste, les apologues sont toujours amusants, et tout le monde aime à jouer avec eux.

Conviens cependant que l’homme est au-dessus de toutes les substances de la Nature, et que, si, en sa qualité de chimiste, il prodigue des mots qui ne devraient appartenir qu’aux relations du sang et du cœur, il faut du moins, qu’en sa qualité d’être moral, il réfléchisse parfois sur la véritable acception de ces mots. N’oublions jamais que plus d’une union intime entre deux personnes heureuses de cette union, a été brisée par l’intervention fortuite d’une troisième personne, et que cette séparation isole et désespère toujours une des deux premières.

– Les chimistes sont trop galants pour ne pas remédier à cet inconvénient, dit Édouard; car ils ont toujours à leur disposition une quatrième substance, afin que pas une ne se trouve réduite à l’isolement et au désespoir.

– Ces expériences, ajouta le Capitaine, sont les plus remarquables. Elles nous montrent les attractions, les affinités et les répulsions d’une manière palpable et dans leur action croisée, puisque deux substances unies brisent, au premier contact de deux autres substances également unies, leur ancien lien pour former un lien nouveau de deux à deux, avec les deux substances nouvellement survenues. C’est dans ce besoin d’abandonner et de fuir, de chercher et de saisir, que nous croyons reconnaître l’influence d’une destinée suprême qui, en donnant à ces substances la faculté de vouloir et de choisir, justifie complètement l’expression « affinité élective » [« Wahlverwandschaft »] adopté par les chimistes.

– Citez-moi, je vous prie, l’un de ces cas, dit Charlotte.

– Je vous le répète, Madame, ce n’est pas par des paroles, mais par des expériences chimiques que je me propose de satisfaire votre curiosité; je ne veux pas vous effrayer par des termes techniques, mais vous éclairer par des faits. Il faut voir devant ses yeux les matières inertes en apparence, et cependant toujours prêtes à agir selon les impulsions de leurs facultés intérieures.

Il faut les voir, dis-je, se chercher, s’attirer, se saisir, se dévorer, se détruire, s’anéantir et reparaître, après une nouvelle et mystérieuse alliance, sous des formes nouvelles et inattendues. C’est alors, seulement, que nous pouvons leur accorder une vie immortelle, des sens, de la raison même, car nos sens et notre raison suffisent à peine pour les observer, pour les juger.

– Je conviens, dit Édouard, que les termes techniques, lorsqu’on ne vient pas à leur secours par des objets que la vue puisse saisir, ont quelque chose de fatigant, et même de ridicule. Il me semble pourtant, qu’en attendant mieux, nous pourrions donner à ma femme une idée des affinités électives, en nous servant de lettres de l’alphabet, à la place de substances.

– Je crains que cette manière de s’exprimer ne vous paraisse trop pédante, dit le Capitaine à Charlotte; mais, à cause de sa précision, je m’en servirai pourtant. Figurez-vous A si étroitement uni à B, que plus d’une expérience déjà a prouvé qu’ils étaient inséparables; supposez les mêmes rapports entre C et D, mettez les deux couples en contact, et vous verrez A s’unir à D, et C à B, sans qu’il soit possible de dire lequel a le premier abandonné l’autre, lequel a le premier cherché et formé un lien nouveau.

– Puisque nous ne pouvons pas encore voir tout cela s’opérer sous nos yeux, s’écria Édouard, tâchons, en attendant, de tirer de cette charmante formule un enseignement utile et applicable à notre position. Il est évident, ma chère Charlotte, que Tu es A et que je suis B, dépendant de Toi, et tout à fait irrévocablement attaché à Ta suite. Le Capitaine représente le méchant C qui m’attire assez puissamment pour nous éloigner, sous certains rapports, bien entendu. Il est donc très juste de Te procurer un D qui T’empêche de Te perdre dans le vague, et ce D indispensable, c’est la pauvre petite Ottilie que Tu es dans la nécessité d’appeler enfin auprès de Toi.

– Ta parabole ne me paraît pas entièrement exacte, répondit Charlotte; mais je n’en suis pas moins reconnaissante à Tes affinités électives, puisqu’elles ont amené entre nous une explication que je redoutais. Oui, je Te l’avoue, depuis ce matin je suis décidée à faire venir Ottilie au château. Ma femme de ménage m’a annoncé qu’elle allait se marier et par conséquent me quitter; voilà ce qui, sous le rapport de mon intérêt personnel, justifie ma résolution.».

Le « Quatuor magique »

Le Carré est la structure de base la plus solide qui soit pour la Construction de la Création. C’est le principe de la Quadrature du Cercle. Transposé sur le plan humain, si l’on considère un « quatuor d’amis » composé de deux couples, l’on a une structure parfaite de relations humaines en laquelle l’Amour et l’Amitié se trouvent harmonieusement réunis. Lorsqu’il s’agit d’êtres aux aspirations pures et nobles – comme c’est le cas avec le quatuor Eduard, Charlotte, Othon et Otilie – la Bénédiction résultant d’une telle « double union » peut être immense.

Chacun des quatre aime, en effet les trois autres. Parmi ces trois, toutefois, il ou elle n’en aime qu’un ou qu’une de ce genre d’amour pouvant naturellement exister entre homme et femme. Les deux autres, il ou elle ne les aime que de ce genre particulier d’Amour appelé Amitié. En réalité, d’un point de vue spirituel – le plus élevé -, l’Amitié n’est pas un Amour de genre inférieur, c’est juste un Amour – parfois qualifié de « platonique » – en lequel la sexualité n’a aucune part.

Un tel amour « platonique » est naturellement déjà celui qui existe entre amis du même genre. Mais il peut aussi être celui existant entre un homme et une femme non mariés entre eux. De ce point de vue, c’est un amour pouvant se montrer très purificateur, puisque le désir sexuel personnel n’y joue aucun rôle. Marié ou non, un homme peut être attiré par une femme, mariée ou non, uniquement en tant qu’amie, et inversement.

Cela répond à la question de savoir si l’Amitié entre homme et femme est possible. Bien sûr, elle est possible. Cela ne pose aucun problème si les deux ne poursuivent aucun autre objectif que l’Amitié. Elle est, toutefois, exigeante, si – ce qui n’est pas du tout une nécessité! – l’homme et la femme éprouvent aussi du désir l’un pour l’autre, tout en étant dans l’impossibilité morale de s’y abandonner.

A ce propos il est notable que si l’on considère un « quatuor » dans lequel existe deux couples en chacun desquels chacun et chacune est déjà – sur le plan de l’amour de l’âme entre homme et femme – parfaitement comblé, la stabilité et la pérennité de ce quatuor sont assurées, parce qu’en son sein chacun et chacune trouvent à la fois l’amour humain et l’amitié correspondant à toutes les aspirations de son âme.

Naturellement, sur Terre, les relations humaines sont et doivent être « compartimentées ». Bien que le mariage et la procréation n’existent que sur la Terre dans la matière grossière lourde, les liens fin-matériels entre les âmes des êtres humain persistent aussi dans la matière fine de l’Au-delà. Mais – ainsi qu’il ressort très clairement de l’Enseignement de Jésus dans les Évangiles -, dans le Paradis il n’y a – conformément à la nature de l’esprit – plus de liens, juste des radiations sans limites entre les purs esprits: « A la Résurrection, les hommes ne prendront point de femmes, ni les femmes de maris, mais ils seront comme les Anges de Dieu dans le Ciel. » (Matthieu XXII, 30 – Marc XII, 25).

Amour et Amitié

L’on dit parfois que « L’Amitié c’est l’amour sans ailes » (dans le cas d’une Amitié purement masculine, avec un clin d’œil, l’on pourrait dire aussi: que « L’Amitié c’est l’amour sans elle« !), en ce sens que l’ardeur donnée – du fait de l’activation de la force sexuelle – dans la matière à l’amour humain entre homme et femme, dans le cas de l’Amitié n’existe pas.

Il est toutefois notable que la même Loi de l’Attraction du Genre Semblable active les deux genres d’Amour: l’amour et entre homme et femme du genre courant et la pure amitié. Mais par deux effets différents. En effet, son action s’exerce à la fois sur la réunion de deux fractions de genre et sur l’attraction des genres complets entre eux. Aussi, à chaque fois, ce qu’il convient de discerner c’est: S’agit-il d’une fraction de genre ou de genres complets?

Par exemple – ce que, alors, Goethe ne savait manifestement pas encore -, l’homme ou la femme ne constitue{nt} pas chacun un genre complet mais seulement, chacun, une fraction de genre: le genre humain. Par conséquent, ce qui, de ce point de vue (d’autres points de vue existent aussi!), rapproche et unit un homme et une femme, ce n’est pas l’effet principal de la Loi (qui ne concerne que les genres entiers) mais juste un effet secondaire de la Loi, que – pour clairement le distinguer de l’effet principal – l’on peut plus précisément appeler « désir de jonction ».

Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’effet qui, de ce point de vue, réunit un homme et une femme n’est pas l’effet principal de la Loi mais seulement l’effet secondaire. C’est, dans l’histoire racontée par Goethe, ce désir de jonction plus fort qui tend à réunir Eduard et Otilie, de même que Othon et Charlotte. Par contre, l’effet qui unit les deux couples entre eux – qu’il s’agisse de la configuration initiale ou de la nouvelle configuration avec la naissance de deux nouveaux couples Eduard & Otilie et Othon & Charlotte – , lui, est bien l’effet principal de Loi de l’Attraction du Genre Semblable. D’où la force et la solidité du « Quatuor » ci-dessus décrit.

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Charlotte et Goethe en conversation - German Master

Charlotte et Goethe en conversation – German Master

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Conclusion

Une fois en présence, les quatre éléments A B C D se comportent comme prévu de par la Loi des Affinités électives, plus justement dit par la Loi de l’Attraction du Genre Semblable: Par l’arrivée de C et D, l’union entre A & B se dissout au profit d’une double union, plus forte, d’une part entre A & C et, d’autre part, entre B & D…

Cela ce n’est, naturellement, que le point de vue « chimique ». Les âmes humaines, toutefois, éprouvent des attractions ou des attirances auxquelles elles ont la libre volonté de donner ou non suite. Et c’est que s’exerce la responsabilité des esprits qui en sont les Noyaux. Une âme déjà liée par les liens de l’amour humain entre homme et femme et qui y trouve la plénitude ne recherchera pas à se lier à une autre âme de la même manière.

Tout comme « Les souffrances du jeune Werther », le roman « Les Affinités électives » s’attachant aux effets de la Loi de l’Attraction du Genre Semblable peut, toutefois, être qualifié de « pessimiste », car, à la liberté de mouvement donnée par la Loi de l’Attraction du Genre Semblable s’oppose la contrainte de la loi morale, ou, plus précisément, ce que les personnages – qui s’aiment et se respectent mutuellement tous les quatre -, en fonction des normes sociales de leur époque et de leur société, croient être leur devoir moral, qui – à l’arrivée – s’oppose à l’accomplissement de leur bonheur terrestre….

Une fois de plus, « Leidenschaft schaft Leiden »!

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Goethe - Charlotte embrassée par celui qui l'aime - Antoine Calbet

Goethe – Charlotte embrassée par celui qui l’aime – Antoine Calbet

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