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Lettre de Victor Hugo
à Alphonse de Lamartine
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« OUI, JE SUIS RADICAL! »
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Lettre de Victor Hugo à son ami, Alphonse de Lamartine
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Pourquoi j’ai fait « Les Misérables »
La Lettre
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« Mon illustre ami,
Si le radical, c’est l’idéal, oui, je suis radical.
Oui, à tous les points de vue, je comprends, je veux et j’appelle le mieux; le mieux, quoique dénoncé par un proverbe, n’est pas l’ennemi du bien, car cela reviendrait à dire: le mieux est l’ami du mal.
Oui, une société qui admet la misère, oui, une religion qui admet l’enfer, oui une humanité qui admet la guerre, me semblent une société, une religion et une humanité inférieures, et c’est vers la société d’en haut, vers l’humanité d’en haut, et vers la religion d’en haut que je tends; société sans roi, humanité sans frontières, religion sans livre.
Oui je combats le prêtre qui vend le mensonge et le juge qui rend l’injustice. Universaliser la propriété, ce qui est le contraire de l’abolir, en supprimant le parasitisme, c’est à dire arriver à ce but: tout homme propriétaire et aucun homme maître, voilà pour moi la véritable économie sociale et politique.
Le but est éloigné. Est-ce une raison pour n’y pas marcher? J’abrège et je me résume. Oui, autant qu’il est permis à l’homme de vouloir, je veux détruire la fatalité humaine; je condamne l’esclavage, je chasse la misère, j’enseigne l’ignorance, je traite la maladie, j’éclaire la nuit, je hais la haine.
Voilà ce que je suis, et voilà pourquoi j’ai fait « Les Misérables ».
Dans ma pensée, « Les Misérables » ne sont autre chose qu’un livre ayant la fraternité pour base, et le progrès pour cime. ».
Commentaire
Bien sûr, dans ce texte, l’on reconnaît la grande générosité de Victor Hugo. Toutefois, même s’il s’agit d’un auteur incontournable et probablement – comme le regrettait André Gide – du plus grand des écrivains français, nous sommes au regret de ne pouvoir – en fonction des Lois de la Création – complètement approuver ses propos ici tenus. Voici donc quelques points à préciser…
Une « société sans roi »: Dans sa jeunesse Victor Hugo était royaliste, avant de devenir républicain. Il a été témoin des abus de la monarchie et de l’empire (premier et surtout second empire), à son époque et au cours des siècles écoulés. Son amour du peuple l’a finalement poussé vers le régime républicain. C’est pourquoi il est compréhensible qu’il puisse aspirer à une « société sans roi ». Ce n’est toutefois pas une société idéale, car, dans l’idéal et dans l’absolu, c’est bien la Royauté qui est le gouvernement conforme aux Lois de la Création.
Une « humanité sans frontières »: Dans l’idéal et dans l’absolu, que l’humanité puisse vivre et circuler sans frontières, correspond sans doute au « monde d’hier » célébré par Stephan Zweig. Toutefois, cela ne doit surtout pas signifier la disparition des identités des peuples et des nations qui leur correspondent. Pour leur préservation, dans le monde réel, cela signifiera souvent l’existence de frontières pour les protéger.
Une « religion sans livre ». Là encore, dans l’Idéal et dans l’Absolu, si, dans la Création – reconnue comme le Langage du Seigneur – la Vérité était intégralement reconnue par l’Intuition individuelle de chaque être humain, aucun livre ne serait nécessaire. Mais comme, dans la réalité, ce n’est pas le cas, nous devons être reconnaissants que des Livres puissent exister qui puissent aussi être des supports pour la Vérité éternelle.
Par « aucun homme maître » Victor Hugo veut sûrement dire la fin de l’esclavage. Sinon, il est évident – et l’on peut être sur que Victor Hugo ne le contestera pas! – que tout être humain doit acquérir la maîtrise de soi, de ses pensées, de sa fécondité, etc.
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