Observation de la nature
humaine
avec La Rochefoucauld
« Une Maxime, c’est le maximum de sens
dans le minimum de mots. »
– « Maximes » –
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La louange
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Introduction
La vocation première du site de l’École de L’Art de Vivre c’est, bien sûr, la Transmission des Valeurs spirituelles. Ce n’est donc fondamentalement pas un site consacré à la Littérature en tant que telle. Mais lorsque des Valeurs spirituelles peuvent être mises en évidence à partir des œuvres de « grands auteurs », classiques, romantiques ou modernes, alors il est aussi bienvenu et opportun de pouvoir s’y référer…
De nouveau, nous nous intéressons à l’écrivain François de La Rochefoucauld et à ses célèbres Maximes. Déjà nous avons vu ce qu’il pensait du soi-disant mépris de la mort. Aujourd’hui, nous nous intéressons à ce qu’il dit au sujet des louanges.
Pessimisme ou réalisme?
La Rochefoucaud est réputé pour être un pessimiste. Il ne se fait aucune illusion concernant la « nature humaine ». Derrière chaque apparente « bonne action », il suppose l’existence d’une motivation cachée, beaucoup moins avouable.
D’un point de vue spirituel – qui est toujours le nôtre! -, quel intérêt? Eh bien, il nous apparaît qu’à la lecture de certaines Maximes de La Rochefoucauld beaucoup de lecteurs auront l’occasion de procéder à leur propre examen de conscience [NDLR: Page privée; nécessite, pour être vue, d’être enregistré(e) et connecté(e)] concernant leurs motivations cachées…
C’est la notion d’abnégation ou de désintéressement ou encore d’altruisme (en allemand « Selbstlosigkeit », littéralement « (fait d’être) sans soi-même ») qui doit être ici au cœur de l’examen de conscience auquel chaque lecteur/lectrice a le devoir de procéder pour lui/elle-même.
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La louange selon La Rochefoucauld
Pour cette fois, concentrons-nous sur les louanges (NDLR: Afin de la retrouver facilement dans l’œuvre complète de La Rochefoucauld, le numéro de chaque maxime a été conservé)… Voici ce qu’en dit La Rochefoucauld (les enrichissements éventuels sont de nous):
143 « C’est plutôt par l’estime de nos propres sentiments que nous exagérons les bonnes qualités des autres, que par l’estime de leur mérite; et nous voulons nous attirer des louanges, lorsqu’il semble que nous leur en donnons. »
Commentaire: Selon L.R. (La Rochefoucauld), lorsqu’un être humain en complimente un autre, en réalité sa motivation n’est pas une sincère admiration des réels mérites d’autrui, mais plutôt dans le secret espoir que l’autre, pour nous remercier de nos compliments, ne manquera pas de nous « renvoyer l’ascenseur »… Alors, qu’en est-il vraiment?
144 « On n’aime point à louer, et on ne loue jamais personne sans intérêt. La louange est une flatterie habile, cachée, et délicate, qui satisfait différemment celui qui la donne, et celui qui la reçoit. L’un la prend comme une récompense de son mérite; l’autre la donne pour faire remarquer son équité et son discernement. »
Commentaire: De nouveau, la louange des supposés mérites d’autrui est présentée comme une démarche intéressée. Dans la louange le loué et le louangeur y trouvent les deux leur compte, même si c’est différemment. Le premier est flatté dans sa vanité, le second attend des louanges pour sa présumée objectivité son supposé discernement.
145 « Nous choisissons souvent des louanges empoisonnées qui font voir par contrecoup en ceux que nous louons des défauts que nous n’osons découvrir d’une autre sorte. »
Commentaire: Lorsque, en réalité, le but est de discréditer quelqu’un mais sans que cela se voie de trop, l’on peut lui faire un compliment qui, en réalité, ait comme but une dévalorisation.
Voici un exemple concret: Dans un public qui connaît la grande valeur de l’Intuition tout en étant parfaitement informé des étroites limites de l’intellect, chaleureusement féliciter quelqu’un pour sa grande intelligence et sa formidable érudition, cela peut être un moyen subtil de diminuer son crédit auprès des autres. En réalité – lorsqu’il s’agit de tuer une réputation – une infraction au cinquième Commandement « Tu ne dois pas tuer ».
146 « On ne loue d’ordinaire que pour être loué. »
Commentaire: La motivation du louangeur est trop souvent celle d’être lui-même loué à son tour.
147 « Peu de gens sont assez sages pour préférer le blâme qui leur est utile à la louange qui les trahit. »
Commentaire: Le but de la vie est de progresser. Même si, dans l’absolu, elles pourraient être méritées, le risque des louanges est de flatter – et donc d’encore accroître – la vanité. Par contre, le blâme, qui met l’accent sur ce qui reste à améliorer, lui, va réellement permettre à celui qui est prêt à tirer spirituellement profit de tous les retours que la vie lui envoie de rectifier en lui ce qui a encore besoin de l’être…
148 « Il y a des reproches qui louent, et des louanges qui médisent. »
C’est déjà ce que nous avons vu plus haut qui se trouve ici encore confirmé: Encore plus que ce qui est dit – louange ou critique – c’est la motivation – qui, elle, n’est pas dite et ne peut donc qu’être devinée – qui compte et s’avère déterminante.
Certes, selon les Lois, ce qui est dit est important, car les mots ont leur sens et agissent, de ce fait, en tant que tels. Mais, parallèlement, les pensées qui accompagnent les mots ne correspondent pas toujours au sens de ceux-ci et suivent leur propre circuit. Cela explique des reproches soient, en fait, des louanges et que des louanges soient, en fait, des reproches.
149 « Le refus des louanges est un désir d’être loué deux fois. »
Commentaire: Dans sa concision cette Maxime est un petit chef d’œuvre. Naturellement, cela pose la question: Le vrai modeste, que fait-il? Il accepte les louanges? La réponse est plutôt: Il ne les entend pas!
150 « Le désir de mériter les louanges qu’on nous donne fortifie notre vertu; et celles que l’on donne à l’esprit, à la valeur, et à la beauté contribuent à les augmenter. »
Commentaire: Par conséquent – si elle est sincère -, la louange a quand même une « vertu » – et pas des moindres -: celle de nous inciter à valoir devant soi-même ce que nous valons aux yeux de ceux qui nous aiment.
Il s’agit de devenir vraiment celui ou celle que ceux qui nous aiment voient en nous. Car il est clair que ce n’est pas pour nos défauts qu’ils nous aiment mais bien pour nos qualités! Et ce désir dirige dans la bonne direction! Il conduit toujours uniquement vers les Hauteurs de Lumière!
152 « Si nous ne nous flattions point nous-mêmes, la flatterie des autres ne nous pourrait nuire. » (Source)
Commentaire: Là aussi, très finement vu! L’opinion louangeuse – et donc la flatterie – des autres ne peut avoir prise sur nous que si elle peut entrer en résonance avec celle que nous avons de nous-mêmes, par conséquent uniquement si nous avons la meilleure opinion de nous-mêmes.
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La « nature humaine » est-elle réellement si affligeante?
L’expression « nature humaine » est ici ambigüe. En effet, il convient de bien distinguer la nature humaine en soi et ce qu’elle est devenue. En soi la nature humaine est dotée des plus magnifiques possibilités pour s’épanouir dans la Création dans le sens prévu par son Créateur.
Toutefois, le Créateur a aussi laissé le libre vouloir à l’esprit humain, plus précisément cela fait partie de son genre, donc de sa nature. Par conséquent, c’est à lui de choisir librement de parcourir le Chemin de l’Ascension vers la Lumière tel que son Créateur l’a préparé pour lui. Le Créateur ne peut pas l’y contraindre, parce que le libre vouloir fait partie de la constitution la plus expresse de l’esprit humain.
Par contre, dès lors où il s’éloigne volontairement de ce lumineux Chemin, il est inévitable que l’être humain en subisse les plus fâcheuses conséquences. Par les Prophètes, les Préparateurs de Chemin et les Envoyés Divins il a été suffisamment mis en garde. Le reste lui appartient: C’est la juste conséquences de ses choix.
Déjà à l’époque de La Rochefoucauld l’humanité était déjà profondément décadente. Au sens strict, ce n’est pas lié à sa nature mais résulte uniquement de ses choix obstinément mauvais depuis des millénaires (selon Roselis von Sass, le dernier Peuple complètement lié à la Lumière a disparu de la Terre, il y a environ 7000 ans), qui, avec la domination croissante de l’intellect, ont constamment rétréci son entendement.
Il n’est donc pas étonnant que La Rochefoucauld, à son époque déjà, ait découvert tant de travers chez ses contemporains et ait, dans ses Maximes, fait part de ses attristants constats, pouvant, par certains, être qualifiés de pessimistes, tandis que, par d’autres, ils seront juste qualifiés de lucides.
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Le miroir des Maximes
C’est ainsi qu’avec ses Maximes – notamment celle sur la louange – La Rochefoucauld – tout comme La Fontaine et d’autres – tend le miroir à ceux qui veulent se regarder dedans, afin de – au-delà des apparences _ découvrir comment ils sont vraiment en eux-mêmes…
Exercice spirituel
A quel point chaque lecteur/lectrice peut ou non être concerné(e) par ce qui est dit ici par La Rochefoucauld, à chacun(e), bien sûr, de le déterminer pour lui/elle-même.
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« Observation de la nature humaine avec La Rochefoucauld »
La louange ne devrait s’adresser qu’à la Divinité!
Toutes les flatteries sont nocives aussi bien pour le flatteur que celui à qui s’adresse sa flatterie.
Des paroles flatteuses de ce genre ne peuvent atteindre en profondeur celui ou celle qui cultive intérieurement l’humilité et la modestie!
L’observation de la nature humaine par La Rochefoucauld nous emmène
dans une pièce de théâtre de l’époque où fleurissent toutes les motivations
cachées que l’être humain, notamment à travers les louanges et les flatteries de toutes sortes.
Néanmoins nous y découvrons également le blâme et les reproches qui tempèrent quelque peu toutes ces attitudes découlant de la vanité.
Sans tomber dans la louange, reconnaissons que l’esprit de La Rochefoucauld brille par sa lucidité.
Quelle bonne idée de mettre en avant ce genre d’auteur!