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Le Matin de Pâques
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« Marie-Madeleine pouvait à peine quitter le lieu du Tombeau. Un étroit sentier au niveau des rochers menait le long de la pente. Elle le suivit, entièrement repliée sur elle-même. Il lui fallait être seule. Ses yeux brûlaient, le front lui faisait mal et elle pouvait à peine lever les pieds. Elle s’assit sur une pierre, regarda longtemps la Tombe et pleura silencieusement.
Peu à peu, sa souffrance se transforma. La terrible torpeur en elle se dissipa en une Prière. Pur et lumineux, un Courant clair monta du fond de son âme, d’abord avec lenteur et hésitation, puis toujours plus fort et vigoureux et, dans la Fonction de Réciprocité, une Profusion de Force descendit d’en Haut vers Marie-Madeleine. Elle ressentit à nouveau la Vie en elle et un éminent Secours sembla l’assister. Une Voix grave et triste, et pourtant consolatrice, lui dit:
– « Le Saint Graal s’est voilé jusqu’au troisième Jour. Ensuite, Tu reverras le Seigneur au milieu des Siens. Viens prier, le matin {de Pâques}, en ce lieu. ».
Une Lumière jaillit en Marie-Madeleine. Il lui sembla que cette Lumière pénétrait à travers la pierre froide, dans le Tombeau scellé.
Elle se leva et traversa lentement le crépuscule. Son âme était en Paix.
* * *
Le lendemain matin, il faisait encore sombre, Marie-Madeleine se rendit de nouveau au Tombeau du Seigneur. Il lui semblait marcher sur Ses traces et accueillir, pleine de Nostalgie, la Lumière affluant encore des Hauteurs vers elle, Lumière Qui, de plus en plus, S’éloignait.
Lorsque, par moments, son esprit, dans le corps terrestre, prenait subitement conscience, une telle douleur d’être abandonnée et perdue assaillait Marie-Madeleine qu’elle croyait s’évanouir.
Elle endurait la souffrance du Monde entier. Mais le Monde ne comprenait pas ce dont il s’était chargé, ce qu’il avait provoqué par la mort de Jésus, par le meurtre du Fils de Dieu. Elle souffrait, mais elle y était contrainte, afin de mûrir en vue du Service que le Fils de Dieu lui avait assigné.
Comment pourrait-elle démontrer de façon vivante aux êtres humains leur culpabilité, comment devait-elle plonger le germe de la Vertu féminine dans l’âme de la femme terrestre déchue, si elle-même ne parvenait pas, par la souffrance, aux plus hautes Connaissances? (…) »
* * *
(…) « Chaque Disciple devait, à sa façon personnelle, parvenir à la Maturité, pendant cette nuit de souffrance, tel était l’Accomplissement conforme à la Loi de cet événement.
Ce fut une sainte Nuit, durant laquelle les Disciples transportèrent le Corps de leur Seigneur du Tombeau au Lieu qui devait le cacher pendant des millénaires.
En priant à voix basse, Marie-Madeleine alla au Tombeau, portant une corbeille avec des fleurs, sous lesquelles elle avait caché des pots remplis d’un baume précieux. Selon la coutume des Juifs, elle voulait préparer le Corps du Seigneur pour le long sommeil.
Arrivée au Tombeau, une grande Force l’entourait. Elle croyait s’élever au-dessus d’elle-même et tout voir dans un éclat blanc surnaturel, les brumes crépusculaires de la plaine, la chaîne des collines s’embrasant légèrement, les jardins touffus couvrant les hauteurs en un large cercle.
Marie-Madeleine s’arrêta; elle se trouvait sous la voûte du Tombeau de roches, des deux côtés rayonnait une Clarté resplendissante. Ses yeux furent aveuglés, mais, grâce à la Force qui lui était octroyée, elle put supporter son éclat.
Des Figures devinrent visibles dans la Clarté lumineuse; elles se détachèrent d’autant plus nettement que Marie-Madeleine n’appréhendait pas le caractère extraordinaire de cette observation.
Elles adoptèrent des formes si précises qu’elles ressemblèrent à des corps terrestres et, cependant, elles étaient transparentes et brillaient d’une Lueur argentée.
– « Ne crains rien!, dit l’une des Figures, et écoute ce que je Te dis: Le Fils de Dieu est ressuscité quant à la Partie Divine Qui était en Lui. Il restera encore pendant quarante jours chez vous et cheminera parmi vous. Vous Le reconnaîtrez par-ci, par-là et vous recevrez de Sa Force pour le Bonheur de la Création-Postérieure. Mais Son corps sera conservé comme témoignage en vue du Jugement auquel la Création sera inéluctablement soumise, pour l’époque du Fils de l’Homme ici sur Terre.«
Ces Paroles se fixèrent pour l’éternité dans l’esprit de Marie-Madeleine, comme si un burin les avait gravées dans la pierre. Son esprit les accueillit, les comprenait et les conservait. Mais sa bouche dit aux femmes qui l’avaient discrètement suivie:
– « Regardez, en arrivant j’ai trouvé la pierre écartée et deux Figures lumineuses étaient à l’intérieur du tombeau. Allons voir les Disciples leur dire que nous avons trouvé le Tombeau vide. ».
Mais, lorsqu’elles revinrent sur leurs pas, tremblantes et sanglotantes d’émotion, et que l’aurore colorait les brumes fines, une Figure issue de la couche de nuage planant sur les collines apparut devant Marie-Madeleine. Un Visage rayonnant, transfiguré par la Blancheur Incandescente Divine la regarda. Des mains se tendirent vers elle comme dans un geste de Bénédiction, les stigmates des clous y brillèrent comme des rubis et la Voix du Seigneur dit avec la vibration claire et la douceur du son dont elle seule était capable:
– « Ne Me touche pas, Marie! Tu ne supporterais pas la Force. C’est Moi! Va et dis-le à Mes Disciples. ».
Marie fut profondément bouleversée. Cependant, une grande Fraîcheur l’animait et sa douleur l’avait quittée. Elle vit distinctement le Visage du Seigneur. Mais elle vit aussi que ce n’était pas Son corps terrestre qui se présentait à elle. Car elle pouvait L’apercevoir seulement avec les yeux saisissant les Images lumineuses venant d’en Haut. Souvent Jésus avait essayé de lui rendre ses Visions compréhensibles. Or, à ce moment, cette Vision devint encore plus claire et plus compréhensible et elle s’effraya de la Grandeur prodigieuse de ce Don.
Et les êtres humains n’en savaient rien! Elle-même avait ressenti les terribles frissons de la Nature au moment du trépas de Jésus et les avait presque oubliés, déjà deux jours après.
Chemin faisant, elle laissa avancer les femmes à une certaine distance, car elle voulait être seule.
De nouveau, le Seigneur S’approcha et dit:
– « Je suis. Je chemine devant Toi vers la Galilée. Trois des vôtres [*] Me verront et cependant ils ne le croiront pas et ne comprendront pas, car ils ne saisissent point encore l’Action des Lois de Mon Père et brouillent dans leur imagination la forme et les effets du processus du Rayonnement Divin.
C’est pourquoi, je T’ai dit: « Ne me touche pas! ».
Ils n’ont connu jusqu’ici que Mon enveloppe extérieure; c’est pour cela qu’ils ne Me reconnaîtront pas. Toi seule, Tu M’as déjà vu avec l’œil spirituel et c’est pourquoi Tu peux Me voir actuellement.
Tel que Tu Me vois, Je suis issu du Père, mais personne ne peut Me voir tel que Je suis en Lui.
Tu voudrais leur en donner l’explication avec mille paroles qu’ils ne la comprendraient pas et ne Te croiraient pas.
C’est pourquoi, ne leur dis que ceci:
« Je marche devant vous vers la Galilée », dit le Seigneur; car Il est ressuscité et Il me l’a dit pour que je vous l’annonce! ».
Ce que Jésus avait dit se réalisa. Ils ne pouvaient le croire. Pierre alla à la tombe et la trouva vide. Il n’y vit point le Seigneur.
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Note:
(*) Bien sûr, il s’agit notamment de Pierre et de Jean, et aussi d’un autre au moins (Selon les Évangiles les Pèlerins d’Emmaüs n’étaient que deux), puisque, selon les Évangiles, à part Thomas la première fois, tous les onze (depuis la défection de Judas ils n’étaient plus que 11) étaient présents lors des Apparitions de Jésus…
– Extrait du livre: « Les Apôtres de Jésus ». –
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